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1907 Eugène fuit la Géorgie et son racisme endémique…

1909 Eugene est Jockey et cavalier de cirque…

1913 Eugene arrive cladestin en Angleterre

1914 Eugene est Champion d'Europe de Boxe à Paris…

1915 Eugene s'engage dans la légion étrangère…

1917 Eugène est le premier pilote de chasse noir Noir de l’Histoire…

1920 Eugène est l’un des précurseurs du jazz en France…

1922 Eugène épouse Marcelle Strautmann, une comtesse française

1930 Eugène est un des grandes figures des nuits parisiennes…

1938 Eugène est recruté par les services secrets français…

1942 Eugène est aux USA, le secrétaire de Louis Armstrong…

1949 Eugène milite pour les droits civiques…

1959 Eugène est décoré par de Gaulle…

1960 Eugène est invité du Today Show sur NBC…

1991 Eugène est intégré comme lieutenant dans l'US Air Force… 

 

Eugène Jacques Bullard,
1895-1961
Petit entête
Petit entête

Eugène Bullard,

une bio express

Les grandes étapes d’une vie…

 

 

Un jeune homme en colère

Une enfance terrible

 

Bullard pilote de chasse

Engagé volontaire pendant la grande guerre

 

Le Grand Duc

Harlem à Montmartre

 

L’Homme en question

Bullard, figure parisienne

 

L’homme engagé

Combattant dans la tourmente

 

Le retour aux USA 

Une fin modeste

 

 

 

 

 

 

Un jeune homme en colère

Une enfance terrible

 

Eugene Bullard est né le 9 octobre 1895, en Georgie, il est le septième d’une fratrie de 10 enfants. Son père - William O. Bullard - le fils d’un esclave d’un planteur de coton est un fermier d’origine martiniquaise, sa mère - Josephine Thomas – est d’origine indienne…

Révolté par une tentative de lynchage sur son père, il quitte le foyer familial vers l'âge de 12 ans avec l'intention d'aller en France car son père lui a dit un jour :

« - Là–bas, un homme est jugé par son mérite et non pas par la couleur de sa peau… Â»

Il passe deux années d'errance avec des gitans, avec lesquels il apprend l'équitation. En 1911, Eugene Bullard devient jockey.  L’année suivante, il parvient à embarquer en clandestin sur un bateau allemand en partance pour l’Ecosse.

En Grande-Bretagne, il enchaîne les petits boulots. Il travaillera notamment comme cible vivante dans une foire à Liverpool… Il apprend alors à boxer et entame une série de combats. Il connaît un certain succès comme boxeur professionnel mais doit partir combattre à Paris car à Londres les noirs n’ont pas le droit de boxer avec les blancs… Dans la foulée, il est engagé dans un numéro de Music Hall et part pour une tournée en Europe qui se termine à Paris… Il y restera !…

A Paris, il cimente sa réputation de boxeur et va jusqu’au championnat d’Europe. Il est même la vedette des soirées de boxe de l’Elysée Montmartre. Là il rencontre la bohème de la butte et les célébrités qui viennent s’y encanailler !

1914 la Première Guerre Mondiale éclate. Il décide de s’engager.

Il n’a alors 18 ans…

 

 

Bullard pilote de chasse

Engagé volontaire pendant la grande guerre

 

Le 19 octobre 1914, en se vieillissant d'un an - déclarant être né en 1894 au lieu de 1895 - Bullard s'engage dans la Légion étrangère française.

Matricule 19/33.717

En juillet 1915, il rejoint  le 170e régiment d'infanterie surnommé les "hirondelles noires de la mort". Compagnon d'armes de Moïse Kisling et de Blaise Cendrars avec qui il sera ami jusqu'à la fin, il participe, comme mitrailleur, aux combats sur la Somme et en Champagne.

Il se retrouve à Verdun où, le 5 mars 1916, il est grièvement blessé aux jambes. À son réveil dans l’ambulance, le médecin lui annonce qu’il ne remarchera plus!

En convalescence à Lyon, il se bat pour remarcher. En visite à l’hôpital, le colonel Girod, responsable des écoles de pilotage de l’armée, le remarque. Le courant passe entre les deux hommes…

À la sortie de l’hôpital, il est cité à l’ordre du régiment le 3 juillet 1916 et se voit décerner la croix de guerre. Déclaré inapte pour l'infanterie, Eugène veut continuer à se battre. Il écrit au colonel Girod et, en octobre 1916, est admis comme élève-pilote dans l'aviation française. Un de ses amis américains, un blanc, parie avec lui 1000 dollars - une somme importante à l’époque - qu’on le refusera dans l’aviation car il est noir !

Il est breveté pilote fin Novembre 1916 et gagne son pari !

C’est le moment où Edmund Gros - un médecin américain - fonde en France l’escadrille Lafayette, composée de volontaires américains. Eugéne se présente mais Gros le refuse sous prétexte qui ne veut pas de “nègres“ dans “son“ escadrille. Eugene reste alors dans l’armée française…

Il est affecté au 5e groupe de Chasse, à l'escadrille N 85. Il fait très vite partie de la prestigieuse caste des pilotes de chasse, de jeunes gens dont les rêves de gloire se terminent le plus souvent par la mort dans les débris de toile et d’acier écrasés au sol…

C’est ainsi qu’Eugène effectue une vingtaine de missions aériennes et devient le premier pilote de chasse noir de l'histoire.

Il vole avec sa mascotte, son singe “Jimmy“. Il est titulaire de deux victoires officielles et cinq probables. La devise inscrite sur le fuselage de son avion était  â€œall blood runs red“  tout sang coule rouge.

Il devient très proche de deux des plus grands As du moment, Navare et Nungesser, deux têtes brulées combattants acharnés qui, une fois descendus de leurs avions, se transforment en fêtards avec la même énergie ! Eugène est souvent entrainé dans leurs épopées nocturnes…

C’est au retour d’une de ces soirées de permission qu’il se bagarre avec un officier qui l'avait insulté à cause de la couleur de sa peau…

C’est le prétexte dont s’empare Edmund Gros pour le faire casser de l’armée et mettre en prison mais ses amis pilotes le défendent et Bullard s’en sort avec uen simple déclaration médicale ‘Inapte au vol’ en novembre 1917…

En janvier 1918, Eugène Bullard est réaffecté au 170e régiment d'infanterie française et devient instructeur dans le Puy-de-Dôme jusqu'à l'armistice de Novembre1918.

 

 

Le Grand Duc

Harlem à Montmartre

 

Après la guerre, Bullard apprend la batterie avec Louis Mitchell et devient batteur de jazz. D'abord engagé au ZELLI’S - le cabaret de Joe Zelli rue Fontaine - l'une des premières boîtes de nuit à présenter du jazz à Paris, bien avant Joséphine Baker et "La Revue Nègre" quand les artistes afro américains sont encore une curiosité … Il devient l’animateur de ce lieu en invitant des vedettes du jazz américain, une nouveauté à Paris.

En 1922, une nouvelle horrible lui parvient des USA, son frère ainé Hector a été lynché en tentant de défendre la ferme familiale ! Il prend la décision de ne plus retourner aux USA, une promesse intime qu’il n’arrivera as à tenir…

Avec l’aide de Zelli il rachète “LE GRAND DUC“, un petit cabaret rue Pigalle qui ne ressemble pas à grand chose, juste une petite salle et un petit bar. Eugène reprend les ingrédients de ce qui a fait jusqu’alors son succès - la musique et les amis - et le reste suit !

La première vedette qu’il fait venir de Harlem se nomme Ada Louise Smith, connu sous le nom “Bricktop“. Il l’engage en 1924. Bricktop, habituée aux grandes salles des USA, est tout d’abord furieuse de voir la taille de son nouveau club! Mais elle devient l’autre âme du grand duc et entretient avec Eugène une relation passionnelle et houleuse!

Tout les soirs, les musiciens de jazz de passage ou vivant à Paris - Duke Ellington, Sydney Bechet, Louis Armstrong, Josephine Baker et tant d’autres - s’y retrouvent après leur concerts dans d'autres cabarets, pour y déguster la soul food chère aux noirs américains, bavarder et se lancer dans des séances d'improvisation légendaires!

Ces sessions influenceront les habitués : peintres, musiciens et écrivains qui introduisent alors les rythmes de jazz dans leur travail. C’est aussi un refuge, salle de répétition et club-house pour les américains de passage, Bullard y embauche le futur écrivain, Langston Hughes, comme plongeur.

Les vieux amis d’Eugène font le buzz et Le Grand Duc devient le club à la mode où le tout Paris artistique se retrouve pour cette atmosphère effervescente : Picasso, Cocteau, Kessel, Hemingway - qui décrit Bullard dans “Le soleil se lève aussi“ - Fred Astaire et Ginger Rogers y ont chanté et dansé, Poulenc et Honneger y découvrent le Jazz… Beaucoup d’expatriés et de têtes couronnées sont passées un soir au Grand Duc, tant sa réputation était immense et justifiée.

Au grand duc se lancent les danses à la mode…c’est là que le Prince de Galles apprend le black bottom et où Cole Porter et ses amis découvrent le Charleston…

Un autre habitué du club - F. Scott Fitzgerald - insistait pour que Bricktop le ramène chez lui tous les soirs…

 

 

L’Homme en question

Bullard, figure parisienne

 

Bien intégré à la vie parisienne, il se marie le 17 juillet 1923 avec Marcelle Straumann, une jeune aristocrate -. Ils ont deux filles, Jacqueline et Lolita, et un garçon qui meurt en bas âge.

Avec le succès du ‘Grand Duc’, il crée le bar ‘L'Escadrille’ qui devient le lieu de ralliement des aviateurs célèbres, véritables rock stars de l'époque. L’aviation vit alors une ère incroyable avec les premiers records, les tentatives sur l’Atlantique où son ami, l’As Charles Nungesser trouvera la mort en Mai 1927. Une date noire dans la vie d’Eugène…

Il est à cette époque en butte à de nombreuses attaques racistes de la communauté américaine de Paris qui ne lui pardonne pas d'avoir été pilote de chasse. Plusieurs articles diffamatoires sont publiés contre lui. Il est victime de plusieurs agressions verbales et physiques mais l’ancien boxeur qu’il est s’en sort victorieux!

En 1928, le Mémorial La Fayette est inauguré à Marnes-la-Coquette par Edmund Gros, son ennemi juré, qui veut faire graver les noms des pilotes américains à l'exception de celui de Bullard - le noir - provoquant un tollé parmi les anciens pilotes, compagnons d'armes de Bullard. Finalement, seuls les noms des morts au combat seront inscrits sur le monument.

Le crack de 1929  et la crise qui en découle force Bullard à vendre le Grand Duc fin 1930…

Il renouvelle avec le succès en innovant : il lance un club de sport pour gentlemen le ‘Bullard Atlétic Club’ - concept inédit à Paris - où se retrouvent alors nombre de jeunes diplomates, artistes et hommes d’affaire…

Le 5 décembre 1935, Eugène et Marcelle divorcent, Marcelle ayant disparue en abandonnant le domicile conjugal après la mort de son fils l’avait traumatisée. Bullard obtient la garde de ses deux filles dont Joséphine Baker sera souvent la nounou!

 

 

L’homme engagé

Dans la tourmente…

 

Il est très marqué par son divorce, la crise et la montée des fascismes, il traverse une période de déprime dont il sort en 1938… Eugène, qui parle allemand, est recruté par le service de contre-espionnage français, pour surveiller les agents allemands fréquentant “L'Escadrille“, son bar parisien, alors à la mode. Il monte un réseau avec une certaine Kitty - dite Cléopatre - et Leplanquais inspecteur du contre-espionnage…

Un an plus tard, fuyant l’invasion nazie, il quitte Paris avec ses deux filles pour rejoindre Orléans. Là, il rejoint l’armée, mais au cours de durs combats, il est touché par un éclat d’obus à la colonne vertébrale, le 18 Juin 1940. Il est évacué avec ses filles vers les Etats-Unis où il est hospitalisé. Mais il ne se remettra jamais vraiment de sa blessure, moralement surtout !

Il découvre un pays qui lui est devenu inconnu et où un noir se doit de rester à sa place, ce qui n’est pas le style d’Eugène… Il côtoie alors la nombreuse colonie française à new York et  devient un soutient important de la France Libre au sein de l'organisation “France Forever“. Il rencontre d’ailleurs le Général De Gaulle à New York en 1943.

C’est l ‘époque où pour survivre, Bullard exerce plusieurs métiers : vendeur de parfums, vigile et même interprète/secrétaire de son ami Louis Armstrong.

À la libération, en 1944, il revient à Paris, avec l’espoir de retrouver son bar “l’Escadrille“. Hélas ce dernier a été détruit pendant l’occupation. Mais le climat en France ne lui plait plus, l’heure n’est plus à la fête et à l’insouciance et en 1949, il rentre aux USA retrouver ses filles…

Avec une indemnité que le gouvernement français lui verse, il achète un appartement à Harlem.

 

 

Le retour aux USA 

Une fin modeste…

 

En 1949, à l’occasion d’un concert de Paul Robeson pour la défense des droits civiques, des émeutes racistes éclatent. Eugène est tabassé par des militants extrémistes soutenus par la police… Une caméra de NBC filme ce qui deviendra les Peekskill Riots : on y voit Bullard passé à tabac. Le film est largement diffusé à la Télévision mais sans entrainer aucune poursuite. Ces images feront prendre conscience à un jeune pasteur Martin Luther King junior du futur de son engagement…

Il est invité en France pour rallumer la flamme du souvenir le 11 Novembre 1954, il y  retrouve ses amis mais le coeur n'y est plus !

En 1959, alors qu’il est liftier au Rockfeller Center dans l’anonymat les gens de NBC le remarquent, ils sont basés dans l’immeuble! Eugène est invité à raconter sa vie - ce qu’il fait non sans humour - à Dave Garroway au “Today Show“ le show vedette de NBC dans ces années là…

C’est l’année où Eugene retourne en France, invité par De Gaulle… Il y est distingué par le général qui l’embrasse en lui remettant la Légion d’Honneur. De Gaulle, assez avare en compliments, dira alors de lui : “Bullard ! Un véritable héros français…“

Mais c’est dans l’anonymat qu’il décéde, le 12 octobre 1961, des suites d’un cancer de l’estomac. Ted Parson son ami depuis l’école de pilotage en 1916 sera avec lui dans ce moment, il citera les derniers mots d’Eugène qui regarde par le fenêtre : « It’s Beautiful out there ! Â»

Il est alors inhumé au cimetière de Flushing, dans le Queens, dans son uniforme de légionnaire. Les honneurs militaires lui seront rendus par des militaires français.…

Ses mémoires publiées de manière posthume en 1972 : Bullard the black swallow of death - Bullard l’hirondelle noire de la mort - auront un succès d’estime et en 1991 Colin Powell réintègre Eugène Bullard au grade de lieutenant dans l’US AIR FORCE !

 

 

 

Bio-Bullard©Louis j. Gore 2014

 

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